L'ultime crime ! [pv Adrien]

« Je sais. Je suis désolé ma belle. » J’abuse, je suis bien au courant. Je sais que Laura voudrait que nous prenions soin de notre couple mais la réalité, c’est que mon travail de Négociant m’a prit beaucoup de temps dernièrement. Je lui ai bien dit que j’avais une histoire à régler, un ami à aider, mais à la longue, cette excuse commence à être désuète. « C’est bientôt terminé comme histoire. Je te promets que ça rentrera dans l’ordre bientôt. » Sur ces mots, je raccroche mon téléphone. Ce soir, j’ai rendez-vous avec Warren. Normalement, il devrait être déjà en route avec cette Jessica Hartman sur qui j’ai bien hâte de mettre la main. En attendant, je patiente au bar, m’occupant de la paperasse ennuyeuse, comme les paies de mes employés et le renouvellement des permis de vente d’alcool.

Puis le coup de fil. En voyant le nom de Warren, je fronce les sourcils de curiosité. Il ne peut pas être déjà arrivé à notre point de rendez-vous. C’est impossible qu’il ait fait le trajet aussi rapidement. Je regarde Dimitri qui est assis sur le canapé de mon bureau et décroche. L’homme chauve comprend immédiatement qu’il doit être à l’écoute et sur ses gardes. « Oui ? » Aussitôt que j’entends Warren prononcer mon nom, je comprends qu’il est mal. Il se présente comme si je n’avais pas saisi qui il était. « Qu’est-ce qu’il y a ? Tout va bien ? » Il me demande de le géolocaliser et d’aller les chercher. Il me dit qu’il a merdé. Je fronce les sourcils. J’assume qu’il est toujours avec la veuve noire vu qu’il a parlé de lui et de quelqu’un d’autre. Je jette un regard sur Dimitri qui attends mes ordres. « Bien, j’arrive. Assure-toi que personne ne te voit. » Mon homme de main hoche la tête en comprenant qu’il doit aller chercher la voiture et il sort de mon bureau.

Mon téléphone raccroché, j’attrape mon veston et sort de mon bureau sans même prendre la peine de ranger ma paperasse. Personne n’a accès à mon bureau sauf moi, puisque je suis le seul à avoir le code du petit clavier numérique et la clé pour le déverrouiller. La porte verrouillée, je vais voir mes employés au comptoir pour les prévenir que je quitte plus tôt que prévu. Jeremy accepte de finir un peu plus tard pour aider les filles à la fermeture. Aucune des femmes qui travaillent pour moi ne vont fermer le bar sans un homme présent à leur côté. Une fois prêt, je quitte le bar et entre à l’arrière de la voiture qui m’attend devant, Dimitri au volant. « Où on va patron ? » Je lui demande un instant et géolocalise Warren rapidement. J’indique ensuite à Dimitri où se rendre.

Le trajet prend un bon moment. Warren se trouve vraiment au beau milieu de nulle part. Dimitri gare la voiture à côté de celle de Warren. L’ancien fugitif est assis en train de fixer quelque chose, l’air aussi mal qu’il ne l’était au téléphone. Je sors de la voiture et jette un regard au cadavre un peu plus loin. D’accord. Il a tué Jessica Hartman. J’aurais aimé le faire moi-même mais… on ne peut pas tout avoir. En revanche, ça me donne une belle occasion vis-à-vis Warren, ce qui me semble encore mieux dans l’immédiat. Je ferme donc la portière et rejoint Cooper.

« Ne perdons pas de temps, tu veux bien ? » Mon regard se pose sur Dimitri qui approche pour me donner les clés de ma voiture. « Donne tes clés à Dimitri. Il va s’occuper de tout ça. Tu vas monter en voiture avec moi. » Il va me falloir nettoyer ma voiture par la suite, et m’assurer de trouver une nouvelle voiture à Warren par la même occasion. Avec Dimitri, j’approche de la voiture de Warren et je lui donne mes instructions. Cette voiture et le corps doivent disparaître et je sais que Dimitri saura faire comme un pro. Entre ses mains, ce sera comme si les deux n’avaient jamais existés. Je dis aussi à Dimitri, bien que ce soit complètement inutile, qu’il ne doit rester aucune trace de notre passage à cet endroit, bien que totalement désert. « Oui patron. »

Je retourne près de Warren et va ouvrir le coffre de ma voiture. Je prends un sac dans lequel se trouve des vêtements de rechange et lui tend. « Change-toi et donne tes vêtements à Dimitri, au cas où il y aurait une trace d’elle quelque part sur tes vêtements. On partira dès que tu seras prêt. »

Warren est sous le choc. Depuis toutes ces années que je le connais, Warren s’est toujours interdit de tuer. Frapper, ce n’était rien, mais tuer c’était non. La dernière fois qu’il l’a fait, c’était pour les bonnes raisons, pour sauver une femme d’une agression. Cette fois-là, il a été un héros. Mais ce soir, c’était une autre histoire. J’ignore encore ce qui s’est passé mais je vais avoir besoin des détails. Il va devoir m’expliquer absolument tout pour que je puisse gérer la situation au mieux. Mais pour l’instant, il faut effacer les preuves. Je confis cette tâche à Dimitri. Il n’a pas un seul cheveu sur le corps et donc il ne risque pas de laisser un des siens. Il pourra donc s’occuper du reste sans se soucier de lui. Après avoir fouillé le coffre de la voiture, je donne un sac de vêtements de rechange à Warren. Son regard évite le mien alors que je lui dis de se changer. Sans dire quoi que ce soit, il s’exécute.

Pendant qu’il fait ça, je jauge l’ampleur des dégâts et donne des instructions à Dimitri, comme s’assurer qu’on ne puisse pas trouver l’ADN de Warren sous les ongles d’Hartman. Je ne dirai pas qu’elle est une victime car à mes yeux, elle ne l’est pas. Une personne cesse d’être une victime quand elle se prend en pleine gueule ce qu’elle a fait à d’autres. Quand Warren a terminé de se changer, je donne les nouvelles instructions à Dimitri et je lui dis de contacter Rick pour venir le chercher. Après quoi je m’en retourne vers Warren et lui pointe la portière. « Allez, partons. Ça ne sert à rien de rester plus longtemps. »

J’entre du côté conducteur et laisse Warren entrer du côté passager. Quand sa ceinture est bouclée, je démarre et m’engage sur la route en silence. Je laisse une bonne dizaine de minutes à Warren car je me doute qu’il soit sous le choc et qu’il ait du mal à m’expliquer quoi que ce soit. « Rien ne t’oblige à me dire quoi que ce soit maintenant, mais il va falloir me donner les détails pour que je puisse m’assurer de tout régler. » Vite fait, je pose les yeux sur Warren, sérieux. Je n’ai absolument aucune colère contre lui. Il devait certes la ramener vivante, mais avoir été à sa place, qui sait si je ne l’aurais pas tué moi-même. « Cette femme était une veuve noire Warren. Ne sois pas trop dur envers toi-même. » Je sais que ça ne veut rien dire. Un humain reste un être humain pour certains, et je respecte cette façon de voir les choses.

Je démarre la voiture et nous voilà maintenant partis. Je vais devoir la faire nettoyer de fond en comble au cas où il resterait des preuves sur Warren, mais aussi pour effacer toute trace que j’étais à cet endroit précis. Peut-être même que je ferai installer de nouveaux pneus, pourquoi pas. Je vais réfléchir à tout ça quand je serai à New York. Pour l’instant, je dois en savoir plus sur ce qui s’est passé entre Warren et cette femme. Je connais Cooper et je sais avec certitude qu’il n’aurait pas mis fin aux jours d’une personne sans raison, sans motif. Encore moins aux jours d’une femme. Warren s’est toujours interdit de franchir cette limite. Il s’est toujours interdit ce droit de vie ou de mort sur autrui. C’est bien pour cette raison que je l’ai choisi pour mener la mission à bien avant que je ne sois trahi, après tout. Du coup, je sais avec certitude qu’il s’est passé quelque chose. Il suffit simplement d’examiner Warren un instant. Elle l’a forcément agressé. Mais comment ? La logique veut qu’il l’ait installée dans le coffre, sinon ça aurait été trop facile pour elle d’en sortir. Peut-être a-t-elle fini par sortir par le siège arrière.

Je dis à Warren que rien ne le force de me parler maintenant, mais qu’il me faudra savoir ce qui s’est passé. Il me faut gérer cette situation au mieux, inspecter chaque aspect pour pouvoir couvrir nos arrières à tous les deux, voire même à tous les trois. Car c’est bien Henry Mitchell qui nous a donné l’endroit où se trouvait Jessica. Certes, il n’a rien fait de plus, mais si on remontait jusqu’à lui, on pourrait remonter jusqu’à Warren, et jusqu’à moi. Et c’est hors de question. Il me dit qu’il n’est pas certain de savoir me donner les détails comme tout est allé vite. Je hoche la tête, mais il ne lui faudra pas non plus tarder. Pour l’instant, il est encore sous le choc, mais quand il sera plus calme, il n’aura pas le choix. « Comme j’ai dit, ce n’est pas obligé d’être maintenant. »

Je ne suis pas sans coeur. J’essaie de prendre soin de mes hommes autant que je le peux. Ils font le sale boulot à ma place après tout. Alors à voir Warren dans cet état, j’essaie de le rassurer en lui rappelant que sa victime était une veuve noire, mais ça ne lui suffit pas. Il me rappelle que c’était malgré tout une femme. Si d’ordinaire je ne supporte pas qu’on puisse faire mal à une femme, dans cette situation c’est tout le contraire. « Ne te méprends pas. Cette femme était encore plus cruelle que les hommes. Elle l’a mérité. Je te rappelle que Josh a payé de sa vie. » Josh, ce traître. Certes, je lui en veux et c’est sa faute s’il nous a tourné le dos, mais il restait un de mes hommes, et ça faisait plusieurs années qu’il travaillait pour moi. « Tu as évité à d’autres personnes innocentes de souffrir. La famille Mitchell notamment. » Henry, certes, mais surtout ses enfants, dont la fille était nulle autre que la meilleure amie de Rose, et la douce Juliet que le patriarche affectionne énormément selon les rapports de Warren. « Certes, les choses auraient pu se passer autrement, mais elle aurait toujours trouvé un moyen de revenir foutre la merde. »

Il passe ses mains dans son visage alors que mon regard ne quitte pas la route. Quand il se sent prêt, il me demande ce que je veux savoir. Je jette un bref regard sur lui avant de reposer les yeux sur la route. « Tout. Tout ce que tu peux me donner comme information peut être important. Comment tu t’y es pris pour l’enlever ? Comment est-ce qu’elle a réagit ? Comment a-t-elle réussi à venir t’agresser, etc… J’ai besoin de tout savoir pour assurer nos arrières. »

Si j’essaie de ne pas être trop pressé d’obtenir mes réponses, je le suis tout de même un peu et je sais que Warren comprend pourquoi. S’il souhaite rester libre, il fallait que j’aie le moindre détail pour que Dimitri puisse camoufler l’homicide en accident. Alors quand il me demande ce que je veux savoir, je dis à Warren exactement ce que j’attends. Sans que je ne le regarde, les deux yeux sur la route, je l’écoute commencer son récit. Hartman était bel et bien à l’endroit indiqué par Mitchell, séduisant le premier homme riche qu’elle a pu croiser. Elle avait également un garde du corps. Puisqu’il l’a laissée toute seule - permettant à Warren de l’enlever - ce garde du corps ne vaut absolument pas ceux que Mitchell engage pour ses enfants, ça c’est certain. La cible assommée et bâillonnée, Warren l’a mise dans le coffre de sa voiture que Dimitri était en train de conduire en ce moment dans le sens opposé à nous. Il allait sans doute sortir de l’état avec.

La suite ne me surprend guère de la part de Warren. Il a été prudent comme je n’en attends pas moins de sa part, ni de la part d’aucun de mes hommes. Il a tout fait comme il le fallait sans faire la moindre erreur. Je me surprends même à admirer son calme face aux menaces de celle-ci face à Rose. A-t-elle vraiment cru qu’elle pourrait vraiment ne serait-ce qu’approcher Rose à cent mètres ? Quelle idiote. Vraiment… Bref, il marque une pause et je sens que la suite va être plus difficile à raconter. Je ne dis rien. Rien ne sert de me montrer insistant. Le pauvre vit un cauchemar depuis si longtemps alors je préfère ne pas lui rendre la tâche plus difficile qu’elle ne l’est déjà. Je reste simplement attentif et à l’écoute de la suite quand elle vient.

Ce que j’apprécie de Warren, c’est qu’il ne me mentira pas en se trouvant des excuses bidons ou en me promettant qu’il a tout fait bien et qu’il ne comprend pas comment la situation a dégénérée, simplement par peur de me décevoir et en subir les conséquences. Non, Warren est franc. Tout de suite, il me dit qu’il a peut-être mal serré ses liens ou qu’il n’a peut-être pas vu qu’elle cachait un outil. Et j’apprécie ça. On ne saura jamais la vérité, mais au moins, il est prêt à accepter le blâme si jamais j’avais eu l’intention de lui reprocher quoi que ce soit. Mais je ne le ferai pas. Cette femme m’a dupé une fois, alors je ne suis pas vraiment surpris qu’elle ait pu avoir de la ressource. Ainsi, j’écoute la suite. Hartman a réussi à sortir par le siège - comme je l’avais pensé - et a tenté d’étrangler Warren. Comme tout bon être humain, il a eu le réflexe de donner un coup de volant pour se défendre, jusqu’ici, tout va bien. Il a même été prudent de ne pas laisser de marques de pneus, ce qui est brillant de sa part étant donné qu’on aurait pu retracer sa voiture avec ça. Je n’ai donc pas à m’en faire à ce niveau-là non plus.

Jessica a tenté de fuir alors, mais elle n’a pas été assez rapide pour lui. Il me raconte alors comment celle-ci n’a pas voulu coopérer, s’est débattue puis comment elle est morte. Je hoche la tête en réfléchissant. Dans ma tête, au fil de son récit, un plan s’est doucement dessiné. Ses côtes ont dû percer ses organes, ou quelque chose du genre. Quoi qu’il en soit, je vais devoir dire à Dimitri dès demain matin de maquiller tout ça en accident de voiture et m’assurer que les documents de la voiture soient désormais au nom de celle-ci. Il allait me falloir également envoyer un ou deux hommes vider son habitation pour donner l’impression qu’elle a fuit la ville. Alors j’entends encore la voix de Warren sur qui je jette un regard avant de reposer les yeux sur la route. Il s’en veut, c’est assez clair. Il ne voulait pas la tuer, il voulait qu’elle soit jugée. Il me présente ses excuses et je secoue la tête. « Ça va. J’ai un plan. Ne t’en fais pas du tout avec ça. » Je ne suis pas du genre amical normalement. Réconforter mes hommes ne relève pas de mes fonctions. Je prends soin d’eux, certes, mais du reste, je n’ai jamais été très doué. En revanche, cette situation est un peu  ma faute à la base, donc il n’a aucune excuse à me présenter. « C’est à moi de te présenter des excuses. J’ai été trop confiant et cette garce à réussi à me duper. Mon erreur t’a pourri la vie et ça n’aurait pas dû arriver. » Je regarde la route avec un regard noir de colère contre cette femme, mes mains tendues sur le volant avant de finalement me détendre. Ma haine ne me sert plus maintenant. Elle est morte. « Mais je vais arranger tout ça. À partir de maintenant, la voiture que tu avais n’a jamais été la tienne. Elle appartenait à Hartman et elle s’en est servie pour fuir l’État. Tu n’as pas besoin d’en savoir plus. Bientôt  tu seras libre. » Tout est dessiné dans ma tête. J’ai encore beaucoup de travail devant moi, mais ce sera fait rapidement. Demain, ou après-demain, tout devrait être réglé et ce ne sera qu’une question de temps avant que Warren puisse se promener librement.

Je n’ai pas l’habitude de présenter mes excuses et les seuls qui m’ont entendu le faire, ce sont les gens pour lesquels j’ai le plus de respect. Ma sœur, ma mère jadis, Dimitri, Laura… Et maintenant Warren. Ce n’est pas que je ne sais pas reconnaître mes erreurs. Bien au contraire. Je n’ai simplement pas l’habitude de m’excuser pour elles. L’erreur est humaine, dit-on. En revanche, celle-ci a coûté très cher à Warren. Si je n’avais pas fait parti de sa vie, il n’en serait pas là. Il serait heureux avec Rose, au lieu qu’elle soit tombée dans les bras de cet idiot de Smith. J’ai merdé, alors j’assume, et je vais même jusqu’à lui présenter des excuses. Pour le coup, si je suis irrité, ce n'est étrangement pas contre lui. On m’a connu bien plus impitoyable, certes, mais j’ai sous-estimé l’adversaire. Du coup pour ne pas m’attarder sur ces excuses, je lui dis que je vais arranger tout ça, les yeux toujours sur la route. Je lui dis l’essentiel. De toute façon, Warren sait comment je fonctionne. J’ai toujours la situation bien en main – normalement – alors il doit bien se douter que je reprends le contrôle dès maintenant. Je lui dis donc la seule chose qu’il a à savoir, c’est-à-dire que sa voiture n’a jamais été la sienne. Et il me répond qu’il ne veut justement pas savoir, donc c’est parfait.

Entre nous, il s’installe le silence. Il n’y a pas de malaise, mais nous sommes tous les deux tendus du coup j’apprécie ce silence. Je pense à mon plan dans ma tête et tout se met en place assez facilement. Je sais que Dimitri ne laissera aucune trace derrière lui, mais pour ce faire il aura besoin que je lui dise quelles étaient les plaies de celle-ci. Quand j’aurai déposé Warren, je m’occuperai de ça. D’ailleurs, celui-ci fini par briser le silence entre nous. Je jette un regard rapide sur lui pour lui signifier qu’il a mon attention puis repose les yeux sur la route. Sa question est pertinente. Et il fait bien de me la poser. Théoriquement sa dette est payée, mais suis-je fou au point de laisser filer un élément tel que lui ? « Pour être tout à fait honnête Warren, je n’ai pas encore éclairci la question. Oui, j’ai fait une erreur et je suis navré de t’avoir pourri la vie, mais je doute que sans moi ta vie sera bien meilleure en rentrant de toute façon. »

Peut-être est-il temps d’aborder le sujet qui fâche ? Warren ne se doute probablement pas que Rose a trouvé quelqu’un d’autre. Je crois qu’ils devaient se connaître avant car d’après ce qu’on m’a rapporté, elle est allée à l’hôpital et Smith l’a raccompagné chez elle… pour finalement ne plus la laisser. Je doute fortement que Rose ait décidé de se jeter dans les bras du premier venu tout juste quelques heures après avoir su que Warren était parti. Non. J’ai bien vu l’amour qu’elle avait pour lui et s’il y a quelqu’un qui peut bien comprendre ce sentiment, c’est bien moi. Je me ruinerais pour Laura. Enfin, peut-être surestimai-je les sentiments de Rose. Qui sait ? « Déjà, du boulot, ça va être difficile d’en trouver vu ton casier. » Non seulement à cause de ce qu’il a fait pour moi, mais surtout à cause du meurtre qu’il a commis il y a quelques années et de la prison qu’il a faite. Rares sont les employeurs qui voudront engager un meurtrier. Du coup, avec ou sans dette, je crois qu’il aura besoin de moi. Alors sera-t-il libre ? Oui et non. « Et puis il y a Rose… Tu auras du travail à faire pour la récupérer je crois. »

Sa question est pertinente mais je n’ai pas encore réfléchi à ce qui va se passer par la suite. Le but de cette opération était de le faire payer sa dette, pas qu’il s’en crée une nouvelle. J’avais bel et bien l’intention de lui foutre la paix après toute cette histoire. Seulement j’ai sous-estimé l’adversaire. L’un de mes hommes est mort, ce traître ayant dénoncé mes plans, puis Warren a dû fuir. Pour payer cette dette, je travaille fort pour le blanchir, mais avec cette histoire de meurtre, ça complique un peu les choses. Mais je suis loin de lui en vouloir. Je le jalouse peut-être même un peu d’avoir commis cet acte, même si lui ne le vois pas de cet œil. Non, je n’ai aucune rancœur envers lui. J’ai même toujours eu beaucoup de respect pour lui. Rares sont mes hommes qui ont droit aux traitements dont lui il a droit.

J’explique à Warren que se sera compliqué pour lui de s’émanciper de moi une fois rentrés à New York. Il n’aura pas de boulot, pas de toit et son casier judiciaire va le freiner pour trouver quoi que ce soit. Warren me donne raison et je lui parle de tout ça, du fait qu’il n’aura pas les moyens de se trouver un emploi par exemple. Et après, je lui parle de Rose… Et je touche un point sensible. Aussitôt aie-je prononcé son nom, Warren tourne la tête vers moi. Je le vois du coin de l’œil. Peut-être aurais-je dû me taire. Warren n’est peut-être pas prêt à entendre que Rose a un nouvel homme dans sa vie. Mais trop tard. Il me demande si elle va bien et avant même que je puisse répondre, il réalise ce que je viens de dire. La récupérer… je hoche faiblement la tête alors qu’il semble se refermer un peu en regardant la route à nouveau. La vérité fait mal, certes, mais je préfère qu’il la sache maintenant plutôt qu’il le découvre par lui-même. D’autant plus qu’il sait que j’ai veillé sur elle de loin.

« Elle va bien, du moins comme elle peut. Comme promis, j’ai gardé un œil sur elle pour être certain que rien ne lui arrive. » Je regarde toujours la route. J’essaie d’être le plus détendu possible même si c’est un peu compliqué ce soir. « Quand je l’ai relâché, je lui ai dit que j’allais tout faire pour te ramener au bercail. Elle m’a dit qu’elle me faisait confiance, mais je pense que ça a prit un peu trop de temps. » Je marque une pause, le temps de changer de voie et de tourner au coin. « Rassure-toi, je doute fortement que leur relation est sérieuse. Je crois qu’ils se connaissaient déjà avant, mais je ne suis pas certain. Quoi qu’il en soit, je pense que tous les deux se cherchaient juste un peu de réconfort. Il a perdu l’amour de sa vie peu de temps avant. » Peut-être que je parle trop en fait. Bien engagé sur l’autoroute, je profite du peu de voiture autour de nous pour regarder Warren. « Si jamais tu veux te défouler sur lui, pense un peu à moi. Et donne lui un bon coup de ma part. » Je pose les yeux à nouveau sur la route. J’ai toujours détesté Liam. C’est un bon gars, certes, mais personne n’est assez bon pour ma petite sœur. Et puis s’il était vraiment assez bien pour elle, elle ne l’aurait pas quitté, certes ? D’autant plus que maintenant ma sœur est malheureuse et lui, il sort avec Rose. Idiot.

Peut-être suis-je la pire personne pour lui apprendre que sa douce est avec un autre homme mais qui d’autre aurait osé lui dire ? C’est mieux qu’il sache ce qui l’attend à New York, plutôt qu’il avance à l’aveugle, non ? Anticiper les situations, c’est ce que j’ai toujours fait. C’est ce que je fais toujours. Oserais-je dire que je cherche ce qu’il y a de mieux pour cet homme assis dans ma voiture ? Non. Je n’oserais pas le dire, mais au fond, peut-être que c’est le cas. Peut-être que je me mens à moi-même en me disant que mes hommes doivent avoir toutes les cartes en main pour ne pas devenir faibles. Mais au fond, peut-être que c’est simplement une excuse. Je ne suis pas insensible, contrairement à ce que la majorité des gens pensent. J’ai eu du mal à vivre complètement mon couple à cause de cette histoire après tout. Je n’avais pas prévu séparer Rose et Warren aussi longtemps. Comment pouvais-je profiter de cet amour qui m’attendait à la maison alors que leur amour à eux souffrait ? Au fond, je suis devenu plus sensible que je ne le pensais depuis que Laura fait partis de ma vie.

J’ignore le commentaire de Warren, sachant qu’il a tout à fait raison, pour poursuivre ensuite en lui disant qu’il peut le cogner en mon nom s’il a besoin d’une raison de le faire. Sa réaction est… savoureuse. Je souris légèrement, mesquin mais aussi amusé. En revanche, ce sourire est léger et disparaît presque aussitôt alors que j’entre dans Manhattan. Il me demande ce que Liam m’a fait, ajoutant qu’il peut le fracasser pour moi. « Il ne m’a rien fait personnellement en fait. » Je marque une pause et m’arrête à un feu rouge avant de le regarder. « L’amour qu’il a perdu, c’était ma petite sœur. » Je ne parle que très peu d’elle. Elle n’est pas impliquée dans mes affaires et mes hommes sont tous au courant qu’elle ne doit pas l’être. En revanche, ça n’empêche pas que j’ai toujours un ou deux hommes assignés à sa protection de loin, pour veiller sur elle. Ainsi, ils savent tous qui est Samantha Lewis et qu’elle est à protéger plus que je ne le suis moi-même. J’ai pratiquement élevé ma petite sœur et personne ne lui fait du mal. Personne ne lui brise le cœur.

Personne.

« Je ne l’ai jamais aimé simplement parce qu’il n’a jamais été assez bien pour elle. Mais depuis qu’elle l’a quitté, elle a le cœur brisé et… C’est sa faute. Alors… » J’appuie sur l’accélérateur pour reprendre notre route une fois le feu vers réapparu. « Fais toi un grand plaisir si jamais tu as à te défouler. »

Liam Smith. Quel con. Sous ses grands airs de diplômé, il n’en demeure pas moins qu’un moins que rien à mes yeux, surtout depuis qu’il a laissé filer ma sœur et qu’elle est malheureuse. C’est un peu pour cette raison que j’invite Warren à le cogner, lui donnant la parfaite excuse s’il en a besoin. Oh, il n’en est pas obligé. Ce n’est pas une mission. Disons que c’est un cadeau de ma part. Qui serais-je pour empêcher un homme de cogner quand il en a besoin ? Enfin, sauf si c’est sur une femme. Ça c’est hors de question. Bref, je finis par entrer dans un stationnement souterrain dans l’immeuble où je possède un appartement au dernier étage qui a servi de planque à plusieurs de mes hommes auparavant. C’est maintenant au tour de Warren de l’occuper. L’entrée de l’appartement étant l’ascenseur, il ne risque pas de croiser quelqu’un dans un couloir. « Malheureusement oui, mais ce sera seulement le temps que les choses se tassent un peu, que j’ai le contrôle de la situation dans son entièreté. Après, tu ne risqueras plus rien. »

Nous sortons de la voiture et je l’escorte jusqu’à l’appartement en silence. La porte de l’ascenseur s’ouvre sur un somptueux appartement de luxe dans lequel il sera plus que confortable. Il ne manquera pas non plus de distraction. Il a la télévision, une table de billard, un coin musculation et même un mini-bar. « Si tu as besoin de quoi que ce soit, tu connais mon numéro. J’enverrai quelqu’un dès demain matin avec des courses pour remplir les armoires et le réfrigérateur de nourriture. Il y a déjà des vêtements dans le placard de la chambre normalement. » Je m’avance alors vers la porte après avoir annoncé mon départ. Je m’arrête en entendant sa voix et le regarde. Ce qu’il me dit me touche plus que je ne le laisse paraître. Au fond, Warren est sans doute l’un de mes hommes envers qui j’ai le plus de respect après Dimitri, et ce que je fais pour lui aujourd’hui n’en est que la preuve. Je ne me mets pas à risque pour n’importe qui. J’aurais pu le laisser couler, le laisser croupir en prison et assumer la faute. À la place, nous voilà ici. « Le respect est mutuel Warren. Je te tiens au courant de l’avancée de la situation. » D’un hochement de tête, je lui dis au revoir et quitte le bâtiment. Dans la voiture, j’appelle Dimitri pour le mettre au courant de tout ce que je sais sur cette histoire afin qu’il puisse se débarrasser parfaitement des preuves. Une fois ceci fait, j’envoie quelqu’un le rejoindre pour le ramener et je rentre chez moi, serrant Laura dans mes bras une fois que je me suis glissé sous les draps comme si rien ne s’était passé.